Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Bruno ODILE
Archives
Publicité
Bruno ODILE
Visiteurs
Depuis la création 46 183
Derniers commentaires
11 avril 2014

L’handicap transforme le vide.

Syliva_naakt_in_stoel_gezeten_Albert_Carel_WillinkCe n’est pas ma voix que j’entends sous les décombres. C’est le murmure chinois des ombres sans relâche. Des serpentins remontent de la plainte et j’écoute battre mon cœur au milieu d’une nuit piteuse à tomber raide mort. J’ai rendu mon corps aux brise-l’âme. J’ai retrouvé le berceau d’un soma-psyché ratissant les foins coupés. Je flirte à présent avec les sons stridents qui vibrent dans les roulades de mes tripes.    

Combien le doute grisâtre repose en moi ! Ces lentes et laborieuses tractations avec le réel, faut-il les vénérer ou tuer leurs espoirs ? Quelle frontière nous sépare ? Des secrets valides n’atteignent pas l’handicap. Des bouches sèches s’abreuvent à des oasis. Des joies closes m’échappent. Ma compréhension boite. J’erre dans l’innocence physique où la nudité n’admet pas d’être décrédibilisée. Choqué, choquant, chaque partie obsolète de mon corps répugne à déroger aux limites qu’il s’est fixé. Je dois revenir à l’essentiel, s’il existe. Chaque respiration est une victoire sur la mort et il n’est pas indispensable de jouer à être un autre que soi.  

Forcer le destin n’est-ce pas continuer le monde tel qu'il existe, dans la splendeur, dans l'injuste, dans la liberté, dans l'inachevable ? Je répare mes cicatrices avec le baume de l’insolence et celui de mon ego. Je m’ajuste, diront certains, à ce que je suis profondément. Tout le monde sait bien que paraître, c’est disparaître. Toute vie esthétique est désespoir, répète Kierkegaard. Sans doute, la désespérance nous sauve d’une démobilisation qui serait meurtrière. Mais, trop d’influences extérieures déjouent l’altérité et, pour survivre à la vie ou à l’enfer, il faut chasser tout ce qui nous semble incurable. La validité qui nous est confisquée ouvre les voies vers l’évanouissement des mots. L’handicap transforme le vide mais je reste debout dans le charnier verbal. J’écris à partir de l’affreuse imperfection qui me définit.  Mon cerveau doit s’éteindre pour que s’échappent les mots inclassables et persuasifs où se désaltère ma survivance. Le saignement de mes débris recueille les alternatives des nœuds dénoués, inéluctablement voués au dénouement.

 

- Bruno Odile - Tous droits réservés ©

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité