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Bruno ODILE
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Bruno ODILE
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5 juin 2016

La transe légère.

petit0586132001337363822Il faudrait pouvoir donner la parole au pain ranci dans tes poches et à tes lèvres gercées par la froidure du monde. Il faudrait délivrer la musique des violoncelles pour qu’elle défonce l’argot du monde et le traduise en un hymne universel. Les frissons de peau ne poussent pas dans les usines à calibrage. Il ne suffit pas de conjurer le sort pour voir naître les fleurs qui poussent dans le ciel. Les rencontres sont des portes qui s’ouvrent. 

 

La paix que j’endure au fond de mon être est dérisoire les soirs de pleine lune, elle est extravagante les jours d’inondation. Ma récolte est une vrille enfoncée dans la terre, mon panier est une couche où pourrissent les fruits mûrs. Mes concerts, je les emporte comme une crème apaisante sur les tonneaux de mes ivresses. Je n’ai plus la soif des terres arides. Je cède à l’amour parce qu’il ne transige pas avec le langage. C’est le seul à jouer des instruments où le vent s’engouffre. Je suis candide comme la rosée qui n’a pas connu l’évaporation. Je marche sur la lune, la tête envolée sur des partitions défiant les notes que les hommes fredonnent. Je suis blotti dans le murmure des corps qui s’étreignent sans restriction. 

 

Je n’ai pas de lit où poser mes rêves, je suis un exilé des pensées tièdes. Mon ordonnance ne peut s’écrire avec des mots. 

 

L’intimité est comme une sirène planquée dans nos veines. Chaque miroir est un tombeau pour la fertilité que l’on pose derrière soi. La mémoire est l’expression de ton absence dans une autre langue. C’est la musique d’un glaive dans un autre fourreau. C’est une fièvre longtemps conservée dans son état brut, dans son gémissement minéral. La terre tourne dans un autre sens. Le cri matinal connaît le virage à cent quatre-vingt degrés. L’aube déjante.  

 

Parfois, un silence en vaut mille. Parfois, un moment édenté de vie berne la carie du temps. Fidèle à lui-même, le ressenti dépucelle les herbes sauvages. Mon chemin, lui-même, ne sait pas où il me conduit. C’est mon pas qui avance, pas moi. Je me jette dans l’ultime parole du hasard. Je réponds au silence d’ivresse et j’évite les autres. C’est dans la solitude que mon royaume sensuel s’émerveille. Partout, le monde trop grand me fait peur.

 

Je largue mon cœur dans la tourbe où je psalmodie l’encre de mes racines. Je ne mens jamais volontiers, j’intercède vers la convergence de l’esprit et des aspirations qui me taraudent. J’intercepte à peine le réel. À l’intérieur de mon armure, j’avance vers l’infini comme un lilliputien gravit les mottes de terre après le labour. J’affectionne les heures bleues où les nuages ne sont que de simples sacs cotonneux.

 

Il est inutile de refaire toujours le même chemin, tête haute, j’ouvre la marche vers l’inconnu. Mon cœur est une salve sans artifice, une quittance sans provision. Aveugle, il t’accueille comme la nuit ensorcelle ta main et je coule avec l’heure close qui s’en retourne à l’immensité. Je suis émancipé de tout l’univers qui m’engendre et me traverse. Je suis accroché à l’air que je respire et parfois, il ne m’en faut pas davantage pour goûter à la légèreté de la démesure.

 

- Bruno Odile - Tous droits réservés ©

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