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Bruno ODILE
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Bruno ODILE
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27 juillet 2017

Le réel discursif accouche d’une marre de rêves.

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Quelqu’un tisse une toison d’éclairs sur le mur d’en face. Glaneurs infatigables, les plis de la bouches’ouvrent et se ferment sous la luminosité intermittente.

 

        Je vois une langue qui s’agite, roulant dans l’air et tournant vers la lumière. Un mot dans la gorge s’éclaire puis disparaît dans le puits des songes.

 

Un peu plus loin, une femme se penche puis s’approche. Marchera-t-elle jusqu’à sortir de l’ombre ? Âme frileuse, farouche, lassée par le brouillard, elle parle encore à voix basse.

 

            Mes sens défaillent, mon cœur sans provision hallucine. Je boite à hue et à dia aux sources de dilettante. Derrière la fenêtre ronde, des cheveux blancs tombent sur la cendre froide du silence.

 

J’ai beau chercher, je ne vois pas la terre humide, ni le shampoing du ciel.

 

Mes mains voudraient toucher le bleu fantôme, même si je ne le discerne pas. Vraiment, cette lumière d’été est un vertige.

 

          Inutile de chanter, nous ne sommes pas préparés à une fête dans le vide.

 

Mandibules apprivoisées, des racines cheminent la mer intérieure où l’on navigue.

 

Aux pas bleus, l’herbe roucoule et l’invisible passage du néant s’acharne à renverser le soleil sur sa tranche.

 

      Un ravin pénètre nos bouches et nos gestes infusent à la lisière d’un site inoccupé. Plus rien ne subsiste, si ce n’est cette ouverture flasque dans l’épaisseur du monde.

 

Témoin, bien malgré moi, du chahut qui fait vibrer les hommes, il me faut franchir l’injuste moment où la parole devient matière.

 

Des chaînes et des canons offusquent la chair dévastée dans son auguste logis. Le sang répandu depuis des siècles pleure la Vie enfermée dans un tombeau de feu où s’alarme la beauté.

 

             Une forêt de bras et de jambes s’inonde dans la mémoire siphonnée. Ensevelie dans mon intimité, une boucle innommable remonte mon corps effarouché.

 

 

*******

 

 

               Quelle voix surgit près de moi ? Quel gémissement titille mon oreille ? Dans le silence du monde, j’entends battre mon propre cœur. Je suis ballotté par une tension qui n’est pas la mienne. Je communie avec une promenade sans frontière, un lieu virtuel où les mots et les âmes se décolorent.

 

Il y a une vie derrière les paroles. Au fond de chaque mot, une histoire se trame. Comme une bougie sous un abat-jour, comme un grain de lumière sous la porte, comme le masque tenu devant le visage vivant. L’ombre qui nous suit absorbe la fièvre fissurant les limites de nos impuissances.

 

                 L’inconnu apparaît comme une douleur pour l’esprit assaillant notre corps. Rien ne nous est vraiment dissimulé en dehors de l’impact avec l’infini. Nos gestes sont des points, nos rires des virgules et nos volontés des guillemets ouverts sur l’horizon.

 

                          Tous les mots sont rangés dans la même pataugeoire, dans le même bassin d’assertions réglementées. Nos voix sont des signes aériens dictés par le goutte-à-goutte de ce qui se meurt à l’intérieur de la chair.

 

Jamais assez de nudité pour étreindre le vide. Toujours cette fosse terrifiante protégeant la raison. L’assise fortifiée repose l’esprit volage. Dans la cacophonie de l’illusion, la folie et le discours pur se mélangent, s’entrechoquent et se dispersent.

 

            Par une opposition soutenue, le jour et la nuit se retiennent par les mains comme les nœuds des marins lorsqu’ils restent à quai s’informant mutuellement des transparences mutantes.

 

Nos gestes sont des points forgés sur la pierre, nos rires des virgules frivoles et nos résolutions des ponctuations ouvertes sur l’horizon.

 

                Acculées au persistant devenir, l’amour, la haine et la colère enveloppent doucement l’encéphale brûlant de nos émotions et, en un instant, apaisent les méandres entrouverts de la direction.

 

            Où aller ? Où marcher ? Toutes les routes s’offrent à la marche en avant. Laquelle procurera l’accomplissement de la découverte heureuse ?

 

Assez de retour sur soi, de sondages introspectifs hasardeux, je veux être une corde vocale dans l’apesanteur des trous du ciel.

 

          Ce que mes yeux ne voient pas, mes sens l’évaluent avec plus ou moins d’à-propos. Je connais le sommeil qui distance et l’heure affriolante de l’intervalle juteux. Un geste, un trajet, un estuaire, un delta, un lieu d’explosion ravive toutes les espérances.

 

            On ne peut porter à son cou toutes les misères du monde. Ma conscience aggrave mes peines. Trop de lucidité accable la réalité de multiples fardeaux.

 

   Mais qu’est-ce que le temps sinon l’ombre portée de la vie sur elle-même ?

 

Seul, je chavire déjà à mes propres faiblesses. Une poignée de clarté dans la voix pourrait orienter le silence vers d’autres contrées, dans une course insoutenable où les formes déconcertantes de la parole s’éteindraient sitôt le souffle recraché par la poitrine.

 

Quel signe ostentatoire garderais-je sur mes lèvres enflammées ? Je tisonne et je grésille encore à l’âtre du silence.

 

Devant moi, sur la route mal dessinée, tout se hausse des foudres paroliennes. Ce qui vit comme un cri d’audace invisible s’exclame pour renaître plus loin.

 

      Ma chair désirante et mon patois racinaire s’extirpent avec précaution des jours ensevelis.

 

Je désire l’été plus proche et la nuit plus accueillante. Mais le noir erre de toutes parts, brunissant les pages encore vierges et les gorges immaculées.

 

Je m’illumine dans le mirage où chantent les cigales de mon cœur. Dès l’éveil du matin clair, je souffre piteusement avec les souffles nus des voix environnantes.

 

                        Mon regard se perd dans la souillure éternelle du bleu et du vert. Vivement que le ciel perde de l’altitude et que ma voix s’écrase sur l’herbe verte où perle une goutte de rosée !

 

      Dans la froidure de l’infini, mes sens se lèvent au centre d’un royaume de feu.

 

Plus rien ne peut aller au-delà de ce voile de cendre lumineuse. Alors, je porte ma voix comme une étoile au milieu de la houille. Je transcende l’appel fatal des choses mortes vers le périssable de la parole.

 

         N’aurais-je vécu qu’un instant artificiel ou serais-je redevenu la vibration édentée de l’air ?

 

             J’ai soif d’apostrophes, d’invitations et d’absences intrusives. À l’assignation de la matière, il faudrait pouvoir nager comme une truite à la rencontre du lieu de naissance.

 

Sous mes paupières, je prends soin du combat d’espérance. Au sommet des huttes charnelles et des douleurs légendaires, je hisse le champ de bataille ailleurs que sur les mines anti personnelles des joies sédentaires.

 

J’habite dans ce moment de ressassement illettré où le réel ne semble plus être autre chose qu’une bouffée de sang à l’extérieur d’un Moi résolu au néant.

 

      Hors de la horde échancrée des syllabes, il faut entendre retentir les sabots d’une chevauchée d’atomes. Tous plus ou moins libres, torturés et brisés par l’élan sincère du qu’en dira-t-on.

 

Commères et commérages aimant parler le verbe ambigu, le signe indistinct, la parole commune et l’émotion de quatre sous se débattent inutilement dans le jour.

 

Il est vain de morigéner ou de pleurer, la langue fourchue se déshabille toute seule à lumière de la vérité.

 

      Tout se tait au creux de la lampe de pierre. Ci-gît la vie roulée dans une farine d’os.

 

La respiration reformulée, sans corps et sans gîte, retrouve la neige blanche qui s’est faite eau, lumière et brûlure.

 

- Bruno Odile - Tous droits réservés © 

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