Je me suis échappé de mon visage.
Le bonheur n’est nulle part. Il est aussi vide que l’ennui. Ne peuvent le voir passer que les consciences pleinement établies dans l’instant. C’est un peu comme faire l’amour, de nombreux préludes sont utiles à l’apogée des sens et la jouissance profonde ne dure qu’un instant furtif mais la déchirure est profonde.
Le bonheur n’est nulle part, il navigue dans les brumes opaques sans jamais dévoiler l’ile qu’il cache. D’un bonheur j’ai fait un silence, une croche où la paraplégie du vent danse comme l’indifférence dans la cohue de mes turbulences. Des silhouettes, couchées dans la mort de l’âme fratricide, se relèvent comme le parfum d’une enfance blessée, restée là, malgré les laves bouillonnantes. Consternante beauté du vide, l’apparat des fourrures fraîches cache mal la vacuité de l’amour du beau.
A fleur de vie, l’horreur et le merveilleux rôdent autour de moi. Sur le seuil du jour vivant, mon cœur ballote. Je me suis échappé de mon visage, maintenant, je plane sur l’écho de mon enfance. Je construis une cabane dans les gorges fracturées d’un silence d’été. Je baille d’une sieste coagulée aux soupirs du silence. Je suis dans l’arène du monde, un filet à la main. L’exil est sous ma pioche et je gratte le sol loin dans le temps, mais le mystère n’est pas là et mes rêves le poursuivent jusqu’aux sueurs froides de l’obscurité.
- Bruno Odile - Tous droits réservés ©