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Bruno ODILE
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27 février 2014

Je suis prisonnier d’un non-lieu.

DSC_0066_France_Nu_Jeune_Femme_Concours_Beaux_Arts_avant_guerreL’écriture est la fleur fragile de la pensée que la main recueille. Elle évolue, mue et remue dans la couche profonde où l’on récolte, aveugle, l’écho de sa propre nature. J’ai besoin de mots pour remplir mon panier troué. Je creuse en moi le liquide des signes et je l’applique sur mes lèvres. Mon corps souillé de mémoires imparfaites aligne sur le bûcher de la parole l’irrémédiable impression que les mots égarés ont perdu tout leur sens. Parfois, ils me dépouillent avec la brusquerie impérieuse de l’urine du jour. Je suis entièrement nu sous leurs habits transparents.

C’est dans les moments critiques que l’on s’en retourne, fébrile, à la somme d’hypothèses vraisemblables. La probabilité rassurante détrousse la précarité des situations où la vie, elle-même, se remet en cause. Le rationnel rassure la réalité empirique. Malade de mes absences, je réclamais au médecin qu’il m’informe des chances que j’avais de retrouver les facultés essentielles de ma main écrabouillée. Sa réponse arracha les derniers soubresauts de l’espoir : « Il n’y a plus rien à faire ». Finalement, mes pensées virevoltèrent dans une plus-value réprimandable afin de suppléer au mieux à cette perte définitive. 

Le destin serait-il donc le résultat de la communion que nous pouvons avoir avec les ondes de l’univers ? Toutes les voix de la délivrance se bernent à résipiscence. L’empathie concédée ne fait pas office de réparation. Toutes les empreintes anciennes doivent s’oublier. Je conjure l’inertie sculpturale avec la force de mon désappointement. Mon orgueil et ma fierté obscurcissent la route. Mes veines transpirent le limon scélérat avec l'effroi de la bête traquée. Tous les chemins à prendre sont envahis de flaques hiémales ciselant la torpeur.

Embrouillé, je me crée et me recrée avec le hasard des foudres brailleuses. Mes dés à jouer sont du manioc pour la compassion que je m’accorde. A demi dans la feinte, je ne suis que la copie de moi-même. Je réapprends à boire en levant le coude. Tous mes muscles ne répondent plus à l’appel. L’importante perte musculaire amenuise la capacité de mes gestes. Je navigue dans les couloirs de l’hôpital avec l’élévateur qui remplace mes jambes. Sans vergogne, quatre bouts de fer me sont tutelle. Seul dans mon lit, j’assiste ma dépendance avec la monotonie de la simulation. Je ne sais plus si demain se conjugue au futur. A mon insu, j’ai des cicatrices inoculées à la rétine brillante et leurs croûtes épaisses m’empêchent de voir le jour se lever. Je suis prisonnier d’un non-lieu.

 

- Bruno Odile - Tous droits réservés ©

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