Ma rancune est flexible.

Ma vie est rebelle aux surfaits. Partisan des faucheurs de vent, j’alterne d’un lampion à un autre. J’ai la tête d’un serpent et je mords le fard qui s’applique sur le souffle des mots. Etrange précarité de l’être sans paraître, une flamme s’étire dans l’œil de l’autre. L’étranger n’est autre que moi-même aux détours capricieux d’une langue de vipère. Ma vie monte en neige dans l’acidité des brumes jaunâtres et je m’étire comme un élastique dans l’ombrageux voyage de la souffrance sans rebondir sur l’écho de mes plaies de lumière. 

Quelles que soient les raisons de notre survivance, jusqu’où opèrent-elles ? Quelque chose flotte très loin et tout près d’ici. Entre joie et tristesse, des voix incolores brisent le silence avec un tutoiement inapproprié.  

L’idée d’une éternelle jouissance est un panier de crabes. Tangente au monde des mythes, stagiaire de la brisure, j’accentue la compression jusqu’à la rupture des lignes. Ma rancune est flexible, elle exhorte mon coefficient de résistance. Traits, cordes, cordeaux, barres, ratures, limites rigides tout revêt l’aspect de ma frugalité.

- Bruno Odile - Tous droits réservés ©