Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Bruno ODILE
Archives
Publicité
Bruno ODILE
Visiteurs
Depuis la création 46 189
Derniers commentaires
29 octobre 2014

Il y a de l’ombre sur le carreau du jour.

imagesOFP220PFJ’aimerais purifier la tendresse échouée sur les rives désuètes de mon âme. J’aimerais savoir qu’il n’est pas trop tard pour manger aux fruits de la lumière. Je voudrais penser que tout meurt dignement : les arbres et les forêts, les fleurs et les graines génétiquement modifiées. Dans le noir absolu, je ne vois plus rien, j’imagine. 

Je rêve d’une île de promesses que la mer caresse, d’un silence qui efface les salves de la tempête. Je marche sur l’eau épuisée, sur la mare asséchée. Je ribaude aux jaillissements des puits de feu, je libertine comme une oie gavée par le vent du large. De rien à rien, la mesure est complète. Nulle équivoque ne vient tenir la main du vide. J’ai grand besoin d’un désert où applaudissent les cauchemars mourants. Je séjourne loin de moi et je rebâtis sans cesse l’hologramme qui me retourne l’image de moi-même dans le miroir du temps d’amour. Malgré la misère du monde et celle de mon royaume, j’attends les jours de fêtes qui savent déformer le pugilat qui m’étouffe. 

D’un rire, tout percevoir d’un coup. Le monde est né dans mon regard et la vie l’a suivi. L’air m’a mordu de suite et le jour a imprimé sa morsure instantanée. Mes yeux goûtent aux voyages, ils traversent l’horizon défait de toute horloge et de toute boussole. Je suis là, bercé par la démesure, exilé du secret des mémoires. Quelques lueurs printanières déshabillent le frisson qui m’emporte.

Je succombe au très vif et je m’égare sur la langue du monde. Des lézardes d’insomnies décapitent l’aube d’avant l’aube. Dans les failles de l’air, un ruisseau chute au pays d’avant naître et je suis un récital blafard au cœur de la flamme. Il pleut dans la chair des mots de petites ogives jaunes que l’intonation aspire. Quelques pulsions pragmatiques écrasent l’enclume qui pèse sur les branches de la forêt spirituelle et s’en retournent boire aux racines profondes.

Happé par les reflets du soleil qui brille sur la surface des abysses rutilants, je m’élance à corps perdu vers l’éloge de la nature. Les branches inaugurées en secret tressaillent. J’ai quitté le pays perdu de mes pas et je promène léger sur les effluves fraîches de l’instant. Je réapprends à percevoir. Le monde s’est levé et avec lui mon regard a pris de l’altitude. Du haut de ma tour de verre fêlé, je vois courir les mouettes pieds nus sur la plage. Elles crient et elles jouent, elles ignorent l’attente qui danse dans mes os. 

Je rêve d’un lieu où je pourrais tout recommencer du début à la fin. Dans l’espace des nouveaux gestes, je brandis ma langue comme un chalumeau sur les ailes d’une tourterelle. Je brûle l’air devenu un silence irrespirable. 

Je rêve à l’intérieur de mon rêve qu’une plume s’envole et que le corps de toute chose ne soit plus impénétrable. Tout glisse en moi et disparait. Je suis face-à-face avec l’empreinte vivante du hasard où se fondent tous les noms. Ma mémoire court jusqu’à mon cœur qui l’enveloppe et l’arrête. Du réel, je n’ai retenu que le fantastique. Il n’y a pas de mot pour dire la clameur lovée dans les cendres des nuits mortes à attendre. Je recommence la route de mes nuits blanches et je m’assois sur la caillure sans fin des herbes qui poussent sous ma chair. J’habite le bidonville des humeurs passagères. Le café qui est dans ma tasse n’a plus le goût du noir. Je mange à la pâte brisée des hommes où passe la beauté que j’avais oubliée.   

Il me plairait de goûter à la laitance de l’herbe froissée et d’avaler la rosée cul-sec. Mais, je n’ai pas cessé de vivre dans le mot de trop, après la ravinade de l’esbroufe. Et lorsque mon pain noir rejoint l’étoile brillante, j’entends crisser le mur du son qui déchire le bottin où sont inscrits les signes rougeoyant de l’éphémère. Il y a de l’ombre sur le carreau du jour, de la cire et de la glue sur la dalle d’écume tiède. Tous mes souvenirs fissurent à l’écho du labyrinthe qui m’aspire.

 

- Bruno Odile - Tous droits réservés ©

Publicité
Publicité
Commentaires
S
Je suis revenue vers ce texte..je me dis : oui, tout recommencer jusqu'à ne pas renaître..quand je vois tout en noir et que tout est noir..j'attends demain quand même pour respirer la rosée et ses coulures d'espoir. Rien n'est jamais perdu tout à fait.
S
Il nous reste le rêve et les mots pour changer l'ombre en lumière et tes mots sont toujours fantastiques dans mes yeux
Publicité