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Bruno ODILE
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11 janvier 2015

Un éclair dans la disparition.

493f2a85c3b5e068727eda1964918ba0Nous sommes le passé d’un temps que nous avons cru bâtir. A l’intérieur du miroir, l’éponge a séché toute réécriture et la porte rongée de notre labyrinthe s’est refermée, conservant à l’abri des vents et des tempêtes une pointe d’infini incolore. Quelques instants saisissables prolongent nos ombres dans un tourbillon de gris où une forme de décomposition nous guette. Nous sommes le grain de l’anéantissement. Nous germons, nous fleurissons et nous mourons dans une répétition inconvenante.

Cette nuit, mon sommeil a branlé comme une cymbale d’acier dans un abysse illimité, et, le rêve que je faisais, m’a projeté sur les créneaux de l’abîme des maux. Une eau de feu a traversé ma gorge, un météore indistinct a crevé la peau du ciel. Je me suis assis sur un nuage et tout a disparu. Nous habitions une demeure indicible au cœur du déclin. Nos heures communes flottaient au-dessus d’un squelette en ruine qui n’était pas le mien. J’étais dépossédé de cette chair fiévreuse avec la même indifférence que si j’étais une page de plus dans un livre qui en contenait déjà des milliers.

Une lumière ambiguë tricotait sa laine de visages brouillons. Le temps désincarné s’accordait un répit. Sans doute, mon inconscient expiait sa pitance dans un dernier souffle. J’ai du errer comme cela toute la nuit à l’intérieur de bulles d’air anonymes. Et sous mes paupières, un puits sans fond s’est creusé. Je me suis assoupi et je suis mort dans la parenthèse où parfois les hommes parlent à quelque chose de suprême.

Nous sommes, à présent, soudés aux lagunes peuplées de ronces et d’écume séchée. Plus rien ne nous retient en dehors de ce lien indéfini que l’oubli accorde à la mémoire des papillons.

Je te déserte. Mantra de carbone ou sombre déesse de sel, je te déserte. Le Rhône sépare les terres d’Oc à celles de Provence. L’intimité potelée de ma chair t’a internée dans les tripes de mon cerveau. Tu grouilles à l’intérieur de la face cachée de l’existence. Tu as fais ton lit sur les battements de mon cœur. Tu as jeté de la lumière sous ma couverture et ma misère resplendit dans les couches superposées d’une nuit sans flamme.  

Je t’ai perdue et je ne sais plus dire comment est le monde que je vois. Tu n’existes plus et je dois regarder au travers des lamelles d’ombre pour corrompre le leurre de l’absence. La réconciliation parle à l’être silencieux qui sommeille dans ma poitrine. Je pénètre doucement l’espace où tu manques. Mais, je laisse ouverte la porte derrière moi. Sait-on jamais, il me faudra peut-être rebrousser chemin à toute allure. Dans le retrait de la lumière, je découvre des parfums insolites. Ta voix est une pêche mûre, ton visage sent la naphtaline et tes doigts baignent dans l’éther. Je vais à la rencontre de ma peur.

L’amour n’existe que dans la confiance implacable de la bonté humaine. Je pose mes pas sur le paysage que tu m’offres. Je suis une terre où le jour attend de se dire. Je feuillette les carnets de l’absence et je me rends bien compte que je suis moi-même en dehors de moi. Je me retourne et tu es dans mon visage. Je fais mine d’aller à droite et je me cogne à tes lèvres ; je fais un pas à gauche et je suis nez à nez avec tes joues.

Avant d’être une opinion, l’écriture est d’abord une décharge, un dégrèvement. Je retrouve une multitude de petits cailloux jaunes et bleus dans la lente progression de ma pensée.

Me taire et regarder. Rompre et respirer. Par moment, une nuée d'indifférence me sépare du monde réel et je frôle l’insignifiant. Et puis, parfois, je suis brutalement stoppé par la main invisible du hasard. Des bateaux et des oiseaux coiffent mes yeux. L’éveil frémit et, dans l’urgence à vivre, je me mondialise, je m’universalise. Je suis une crique au milieu de l’enfer. Mes larmes d’amour sont des gouttes de cristal qui se déversent sur des arcs-en-ciel timides et souvent ignorés. Mes pensées effleurent le doute. J’interroge l’existence d’un monde parallèle, d’un monde presque parfait : celui où chacun évolue dans les instants volés à la nudité de la mort.

 

- Bruno Odile - Tous droits réservés © 

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