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Bruno ODILE
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30 janvier 2015

Mon fils, mon arpent, ma source vive

Peinture_femme_nueMon fils, mon arpent, ma source vive, joignons nos mains à la lisière des mots. Ecrivons d’une seule main le souffle qui porte nos bras et nos épaules. Nous sommes la fable du discours envahissant des gènes. Nous partageons la faiblesse des éléments et la grandeur de l’immensité. Aimer implique l’abandon. Submergé, l’horizon célèbre la beauté et j’embrasse la légèreté du lâcher-prise. Je ne suis que tourbillons, mes désirs naissent du présent ouvert et ils se cognent contre l’attente qui m’envahit. 

Odeurs de terre et d’images blotties en fagots sur le rebord de mes cendres. Tout au fond de moi, je touche à la lumière complice, à la joie éclatante. L’ivresse inonde mes racines et le voile des heures perdues disparait dans les fleuves endigués de mon être.

Je me risque à être dans la transparence. Une goutte de trop ou une goutte de pas assez. Une mouette perdue au-dessus de la colline cherche les vagues immortelles. Mais au loin, la mer déraille et se jette derrière la face cachée du jour. J’ai son aile blanche collée sur ma main et le goût du sel sur mes épaules.

Je suis toi au bout des lames d’écume. Tu es moi dans le désir que je n’ai pas choisi. Les algues se souviennent peut-être de l’appel de la vie. Dans ta chair, mon cœur ne pense plus. Enfant marchant sur le vent, tes bouffées dessinent ton visage contre mon torse. Mon âme raisonne pour toi et déjà tu t’éloignes. Serais-je parti de moi-même ? Le chaos se perdrait-il dans un regard, un sourire ? Mon synonyme, ma particule, cela ne sonne pas faux. Et pourtant, fil ténu qui va de l’aube au crépuscule, l’accroc du temps chavire le sablier. Ta voix est une note, un chapelet de rêve où se reboisent les clairières abandonnées.

Entre toi et moi, une lune d’éclats dissipe la grise mine de la nuit. Un siphon silencieux avale la fraîche lumière. Au nombril du monde, des lacets coupés et des tisanes frelatées traînent mon sang jusqu’aux messes journalières de l’inconnu. Un trait tendu rugit sous la bruine, le passé regarde vers la mémoire distendue. Hier sauve l’apparence et l’instant précis réinvente l’horizon élargi. Chaque naissance nouvelle grise le vide et décalamine la solitude. J’ai perdu mes bras avec l’accent qui te touche. J’ai perdu l’oubli sur le front que je caresse. Je te berce encore comme un essaim en sommeil, comme un ventre gonflé par la magie de la création.

Sans le recul de la cogitation, le bon sentiment devient vite une plaie. Il dévitalise la volonté et crispe la crédibilité de nos meilleures actions. Rien ne va de soi, tout pénètre par l’air que l’on respire. Tu me décentres, lymphe des mammifères, je suis le père de la neige et de la vapeur qui sublime. L’onde voyage et la caresse de l’invisible nous retournent parfois la situation d’imposture dans laquelle on se trouve. Rien ne va de soi, tout pénètre par l’air que l’on respire. Je t’accompagne et, en même temps, je jeûne sur ton chemin. Pourvu que mon message de vie ne se transforme pas en message de mort jusque dans ton propre corps.

Compulsions frénétiques, l’organe du feu carbonise de pathétiques œufs de cafard. Dans le fouillis de mes heures creuses, la transformation s’opère à partir d’un infime grain de sable. Ce n’est pas ma chair que se modifie, mais plutôt le regard que je pose sur le monde. On peut aimer l’amour même s’il nous tourmente comme on peut aimer la vie même si elle n’est guère aimable. Il y a toujours cet appétit, cette curiosité du moindre à l’égard de l’infiniment grand. De multiples événements m’ont renversé. J’ai toujours eu l’opportunité de recommencer. Mon existence toute entière est construite pour résister au vide et à l’évanouissement. Chaque grenade de vie dégoupillée nécessite l’éloignement avant d’envisager un nouveau rapprochement. Prendre de la distance, c’est l’acte salvateur qui permet de se repositionner avant de s’ouvrir à la lumière pour s’y épanouir.

Dans l’abyssale effigie de toi-même, déloge les confidences secrètes de ton corps. Laisse gronder le volcan des désirs ; ils savent ce que tu souhaites, ils connaissent la voie tracée hors de la raison qui te bâillonne comme une vérité que l’on étouffe. Il existe des lumières en cerceaux autour des hanches, des ceintures brillantes entourant le vertige. Il est des éclats restés en rebut dans le désenchantement des laves mortes, des oripeaux cramoisis pour avoir soutenus plus hauts les cygnes de nos vœux les plus essentiels. Il y a les limons et les pierres refroidies, il y a l’exactitude du message de la chair et la précision du corps de l’instinct. Il demeure en nous un feu sauvage et le hurlement du loup qu’il nous faut réconcilier avec la teneur du jour. Plus loin que la bave de la première heure, derrière l’apogée de la respiration, écoute le gémissement des étoiles qui traversent ton sang.   

 

- Bruno Odile - Tous droits réservés ©

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