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Bruno ODILE
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Bruno ODILE
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9 avril 2015

Une simple voix retentit et je chemine là où j’ai déjà été.

imagesKLBA0ZWEA présent, nous sommes devenus un rêve en dehors de lui-même. Nos bouches sont défaites comme les draps de nos couches incertaines. Tes yeux dans la serrure du vertige et mes mains sur le sommet du souvenir. Dans l’obscurité, l’étincelle indomptée de nos désirs défile et une pluie de déceptions recouvre l’appel des muses. Jardin privé au milieu de nulle part. Nos silences sont convertis à la gestuelle des corps dénudés. Comme des papillons posés sur des étoiles, nous enneigeons nos soupirs à la pureté de nos âmes. L’écho des vagues douces remue autour de nous comme des ombres chinoises. Qu’existe-t-il d’autre que nous n’aurions pas franchi dans nos tisanes d’amour ?

Un chuchotement sur le bord de mes lèvres recherche le délice goûté au premier jour. Un calice de baisers où l’aube naissante apporte sa goutte de blanc. Nos corps de poussière s’alitent dans le passé et nos amours mortes pagaient sous la roche du temps. Nos cœurs sont liés sous les ailes du corbeau qui traverse l’océan. J’ouvre ma main comme une porte irréelle et ton visage apparaît telle une lampe oubliée dans la cathédrale de l’humanité. Je perce les vitraux de l’oubli et je prie à genoux devant le spectacle de ton sourire. Ô combien tu me manques ! Combien la musique a perdu ses notes ! Je suis amoureux pareil à un désastre répétant la joie connue au pied du monde.

Tu revis là où je ne suis plus et la pensée qui me reste ressemble à un foulard de miel autour de mon chagrin. Demain, j’irai encore m’associer aux marées avec des rêves plein les poches. Que le sel m’emporte au-delà de toute rétention. Qu’il érode mon sang jusqu’au bout de la révolte. J’écoute dans la pénombre le concert de Vangelis et ma peau se retourne. Le noir dévoile un horizon où tu débordes et je mange l’air qui nous sépare encore. Je n’ai toujours pas trouvé l’unité dans laquelle s’ouvre la profondeur comme un souffle parfait. Le temps qui se rétracte, m’écrase. De l’encre fraîche coule de mes doigts. Mes tourments sont à jeun, ils regorgent du vide existentiel que tu as laissé derrière toi.

La mort, c’est l’espace temps d’où je viens et où je retournerai pour me bouturer à l’émotion brute, pour y laver ma respiration et les caprices de l’air. La résiliation du contrat où le nom du bailleur s’efface proclame la perte d’identité. Je viendrai d’un seul pas libérer tous les couacs de mon existence et je m’abandonnerai à cette forme de paix retrouvée. Mais dis-moi, le cheminement de la pensée s’arrête-il avant ou bien après l’émotion ? Durant l’aventure, c’est l’organisation humaine et sociale qui semble se déstructurer au profit des ravins cachés sous nos pieds. Partout la crudité de la vie jouxte les frontières immatérielles de mes sens. Et cependant sentir, c’est m’imaginer vivant. Une simple voix retentit et je chemine là où j’ai déjà été. Dans le bassin d’amour propre, je me fais face de chaque extrémité où je coule comme une rivière qui perdu les traces de sa source. 

Ton souffle congédié brousse encore l’eau sur mes yeux. Ta chair châtrée dégouline des veines de la parole. L’émotion sensuelle demeure cette piqûre insoutenable, cet encroûtement au néant, cette soudure au vent qui m’emporte. J’incarne trop cette étonnante coexistence avec le vagabond qui nous habite, « l’enfer, c’est les autres » (1), faut-il croire. Mais, quoiqu’on puisse en dire, ce métèque aux multiples visages nous est indispensable. Sans lui, pas de rage, pas de pleurs, pas de haine et pas de jalousie. Sans lui, pas d’épanouissement, pas de possible amélioration. Nous cohabitons inconditionnellement avec ce Meursault camusien à la poursuite d’une vérité aussi absurde qu’irréelle, traquant cet astre flamboyant, et pas moins ambigu, qui nous renvoie tout au fond de l’univers. La dualité intérieure demeure le fondement de nos plus belles victoires sur nous-mêmes. Nous sommes tout à la fois notre propre indigence et notre brûlure écarlate. Nous sommes pastichés par l'éblouissement et la fureur. Nous supposons la jubilation comme le fait accompli d’un absolu animé en permanence. Nos perceptions, même les plus anodines, nous rappellent que nous ne sommes pas faits pour mourir.

 

- Bruno Odile - Tous droits réservés ©

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