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Bruno ODILE
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Bruno ODILE
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25 novembre 2015

Je sais que tu seras debout, je sais que tu souriras.

COLLEC_1Sais-tu de quelle nausée s’abreuvent les jours ? Est-ce le cœur sublimé par d’ardentes apogées ou la sauvegarde imputrescible du néant géniteur ? C’est absurde, je cours après le bonheur comme on le fait après les papillons. La joie intense en appellerait-elle à de nouvelles salves ? La satisfaction succombe parfois au paroxysme de la joie éternelle. Elle décharge immédiatement la sensation pure de sa mouture de jouissance. Puis, tout réintègre la banale pudeur du jour. Le soleil éclate dans le cœur béant et une giclée d’amour brave la monotonie d’incessants soliloques.   

L’impérieux besoin d’amour finira par coaguler la lumière au sommet de la colline. Et si je devais t’attendre encore, il me faudrait te découdre à l’immobilité de mon esprit. L’attente projette autant qu’elle prospecte. C’est un temps de contemplation secrètement nourri par l’effervescence du désir. C’est l’impuissance momentanée de l’acte replié au fond de ma chair comme une enclume de désespoir. C’est une pause avant l'effacement, un instant où la vie et la mort se rencontre. C’est l’exigence au repos, prête à jaillir au moindre mouvement d’espoir ressuscité. Encore une fois, tout demeure dans le regard posé sur le monde et sur l’émulsion qui en résulte.

Je sais que tu seras debout, je sais que tu souriras et que l’immensité nous dira toute son absurdité. Pour te serrer plus fort contre moi, j’avalerai tes cendres et je réunifierai l’amour à la mort, la nuit à la mer, les glaçons aux rayons de soleil. La vie n’est plus nécessaire d’où nous sommes. Mon cœur bat dans une horloge sans aiguilles. Mes entrailles se mêlent aux étoiles. Partout, le ciel est un ravin sans fin. Tes yeux sont la corde à laquelle j’accroche le vide. Le rien est sous la tutelle des émotions toniques. Il vibre sans grimace, il tonne comme un tambour, il siffle comme un berger appelle ses moutons. 

J’ai éliminé le feu pour que la brûlure soit froide. J’ai cherché à désangoisser ma mémoire, cette boule de flammes, dans laquelle déglutir est devenu impossible. J’ai retenu mon souffle pour n’entendre que le tien. Mais, il n’est rien d’entier en ce monde. Juste quelques résonances jaillissantes du secret revigorant l’espérance de ses profondeurs. Tes cils cognent la vue. La nudité des heures à t’attendre crève la panse du temps. Toute la buée des champs noie les arbres asséchés. Des racines jouent du violon dans l’air qui fredonne la musique que tu m’as laissée.

L’espace ruisselle des rêves qui me conduisent. Mes dents serrent l’air qui se déchire. Je vais vers toi sans fin comme une lumière entrouvre le brouillard. La vie nous promet son premier jour comme son dernier. Mon cœur n’en a que faire. La mer est dans les yeux de l’étreinte finale, l’enlacement du néant tout autour de nos échos. Le vide est plein de notre mansuétude et il nous faudra combiner tous les possibles pour réinventer le temps dans les ruines du présent. Nous serons seuls mais remplis l’un de l’autre.

Nous serons autre, d’un ailleurs qui n’appartient à rien. Parce que nous sommes des chairs composées d’autres que nous-mêmes. Parce que nous poursuivrons la déchéance dans son désastre fulminant et resplendissant. Le héros de soi, cet étranger à nous-mêmes, sature devant le dérisoire. Nous périrons dans l’innovation inachevée et ressusciterons comme des candélabres destinés à accueillir les bougies ruisselantes d’un feu nouveau. Nos fêtes sont des improvisations. Nous nous subjuguons d’abord, pour mieux nous renverser ensuite dans l'esquille lumineuse qui nous conduit aux foudres intimes de toutes choses. C’est toujours du pareil au même. Nous sommes identiques à ce qui nous éclaire et nous désacralise de la lueur blanche gravée en nos fondements primitifs.

Je me suis déjà départi de tant de choses ! Mais, la mort n’est pas la meurtrière que l’on croit. Elle n’est ici que supposition de nos craintes et de nos effrois. L’adhésion à la vie ne tue pas la mort. Elle la recule, elle la roule comme une pâte blanche qui se prépare sans le savoir à devenir du pain doré et craquant. La conversion qui s’opère entre nous est ce changement par lequel se transforment les substances pour apparaître différentes alors qu’au fond de soi rien n’a véritablement changé.

Néanmoins, si nous désirons assister à notre propre mort, il nous faudra, de toute façon, rester vivant le plus longtemps possible. Jusqu’à la porte verrouillée de l’autre monde. Il nous faudra convertir nos solitudes jusqu’à la pointe du sein orphelin de la matrice originelle.

 

- Bruno Odile - Tous droits réservés ©

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