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Bruno ODILE
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Bruno ODILE
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1 janvier 2016

Cela aurait pu être la terre...

reflet1Factice ou réel, toujours dans la muselière des heures, le silence remplit les auges du voyage dans le voyage. A l’intérieur de la sphère intime, je devine ce que tu espérais de moi. Tu es absente de la parole comme de la vie immédiate et je dois brosser les heures pour les faire briller à nouveau.

L’amour est d’abord né dans l’amour comme le soleil dans le feu. Et pourtant, à la tombée du jour, la lumière crispée renaît dans le rouet des vertiges. Visage sans forme distincte, la beauté s’évade sans qu’on puisse la saisir. Des ombres passent dans les ruelles du cœur et ma peau ferme la terre avec ses pieds.

Il faut piocher dans l’extrémité de l’existence pour déceler le parfum des fibres essentielles. Je n’habite plus nulle part, je suis devenu une hutte flottante, un bivouac de hasard sur le chemin de l’infini. Trop de rumeurs fracassantes coexistent dans ma chair pour que je puisse encore prétendre avoir l’esprit clair.

Cela aurait pu être la terre, l’eau et le fourrage. Cela aurait pu prendre forme et ajourer l’ombre des montagnes. Mais, pour cela, il aurait fallu le ruissellement de la lumière sur le  pétrin du jour où lève l’ardente et courageuse patience. A présent, nos cœurs sont sur la table de mes exaltations les plus proches et les plus fragiles. Le repas est achevé. Il me faut ranger les assiettes et les couverts, puis l’évier encombré. Je pose nos serviettes dans le tiroir de la décrépitude. C’est terminé.

Cela aurait pu être un repas sans terme, un verre toujours rempli, un moment gorgé d’air pur berçant une soirée chevillée aux tempes des étoiles. Cela aurait pu tricoter le silence d’une bouche pleine d’étincelles et celle d’un ventre repu par la caresse de la paix intérieure. Un moment de redondance inoffensive suivi d’un temps de délivrance. Mais tu n’es plus là. Ta place est vide, ton assiette aussi. Et à cette heure close, mon cœur de cigale ne chante plus les balades improvisées de l’été ancien.

Je sais bien que tout s’efface, que tout se gomme à l’éternité. Je sais aussi la rognure des traces rugueuses, l’ourlet revêche sur la serviette et les plis arides restés sur les mots qui renaissent de leur chute. 

Le chagrin migre comme l’hirondelle. Il s’envole pour renaître plus loin, il s’éloigne du froid glacial où naissent les congères. La mélancolie rancunière valse dans ma bibliothèque d’archives déboussolées, elle s’envole droit devant. Son périple est consigné dans son plumage depuis l’origine du temps. Il ne reste que ma vie sertie à la terre comme un diamant enseveli par une masse compacte. Tu es présente au cœur de l’infini, une peau d’eau claire habille ta silhouette sur un rayon de lune noire. J’ai à l’intérieur du crâne mille siècles de foulées invisibles et de sillons inadéquats. J’ai accumulé trop d’ivresses mortes dans les souffles de vie qui s’évaporent.

Ta disparition a provoqué un trou qui me perce à cœur. Dans l’onde ébahie par le reflux, une musique sillonne l’espace ouvert et soulève l’amour de son berceau. Le manque, c’est la réalité qui se dissipe à l’intérieur de ma chair. C’est un noyau de gangrène qui traverse mes entrailles sans jamais s’arrêter. L’absence essoufflée sur le bord de ma langue se dispute la matière palpable et l’incorporel de ta présence. Elle racle les fonds de tiroirs du vide. Mon imaginaire s’agenouille devant la mémoire qui t’habille. Tout l’inexistant finit par déchausser nos corps de leurs souliers de terre. Et nous marchons la langue pieds nus.

Désormais, je soupçonne qu’il faudra te retirer à cet amoncellement de misère et chasser l’embrun. Qu’il faudra éponger ces graviers de morosité liquides et boire à la lie maussade de l’abattement. Tu as trop copieusement habité le projet que j’occupe.

Les mots meurent en faisant des grimaces. Une mouette crie dans l’auge de pierre qui encercle le corps. A trop s’étendre, l’étouffement devient mortel. Les soupirs en rafales glissent copieusement avant de débouler comme de gros rochers qui s’arrachent aux cimes des montagnes. Ici, déterrer la mort, c’est lui ôter sa lumière. L’amour et le manque se rejoignent, s’enlacent et se brisent. De l’un, tu sais qu’il n’y a pas de fin ; de l’autre, tu te retrouves dans l’identité plurielle de l’humanité. 

Ce sont toujours les mains de l’âme qui lâchent les syllabes de mon cœur. Comme si le verbe aimer était d’un autre monde, d’une sphère d’éblouissements irradiants, d’un lieu de recueillement où il pleut de la vie dans un état subliminal. Comme si l’amour ravitaillait un autre convoi que celui contemplatif de l’assouvissement de mon cœur. 

Je cherche à tâtons le chemin de tes courbes, les émotions dans la parenthèse, les sourires encerclés de virgules. Je vois bien que tu pleures. Ta larme glisse d’une étoile à l’autre. La mer hurle sa folie à la terre qui l’enferme. La vague triste fait déborder le chagrin. La voilà, déferlante et perdue, elle s’incruste sous la peau et vient noyer les peines égarées qui jusqu’à lors se déliaient dans les veines de la désolation.

 

- Bruno Odile - Tous droits réservés ©

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Commentaires
L
Merci Ariaga,<br /> <br /> Que 2016 soit passionnant, pétillant et inspiré !
A
Bonne année qui t'apporte la réalisation de tes désirs les plus fous ! Amicalement.
L
Merci à toi, Jeanne.<br /> <br /> Qu’il en aille pareillement pour toi et ceux que tu aimes.
J
belle année <br /> <br /> à toi<br /> <br /> à ta famille<br /> <br /> amicalement
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