Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Bruno ODILE
Archives
Publicité
Bruno ODILE
Visiteurs
Depuis la création 46 183
Derniers commentaires
27 mai 2016

Mon désir est un geste d’adieu.

petit0039317001369584336Nos solitudes sont des passerelles, des bateaux ivres, des radeaux de fortune, accrochés à nos élans comme des ombres oppressantes défiant les frontières de nos peaux. Mille absences grouillent tout autour. Mille échafauds prêts à couper la tête aux images qui s’enfuient. L’absence et le manque ne font qu’un. La solitude fermente dans la débâcle de l’innommable et de l’incommensurable. De l’instant frugal et avide, la foule de visages de notre mine à souvenirs jaillit. Certains viennent à nous comme des évidences, d’autres comme des révélations et d’autres encore traversent notre esprit sans s’arrêter. Ces identités quelquefois perceptibles sont des présences incrustées aux parenthèses de nos déserts. Nous les ressuscitons au cœur même de nos humanités, de ce no man’s land incontrôlable, de cette terre asséchée de raison, de ce fond de l’œil où réside, sans aucun doute, toute une affluence endormie à l’intérieur de nos regards. Et nos voix prennent la forme des percussions restées dans nos ventres. Chaque heurt est un coup vif perforant la mince cloison qui nous sépare de notre passé. Un instant, nous sommes suspendus à des grappes de fleurs et, d’une simple brise, nous chutons comme cet éboulis de pierres qui recouvre la route. 

 

Etre seul, c’est animer les autres en soi. C’est mûrir sous nos paupières la vie secrète des trémas qui coiffent nos solitudes, dans une coopération souvent tumultueuse. En dehors d’un éclair de lucidité, être soi tout entier demeure un impossible rémanent.

 

Parce que la fusion avec l’absolu est inconcevable, il convient de susciter en soi l’acharnement du possible afin d’envisager le calendrier des moments tolérables.

 

Se dépouiller de l’ombre vivante qui nous recouvre, c’est laisser choir tout ce qui se résume de la pensée et de son acquiescement. J’entends seulement l’ébranlement de la raison qui s’écroule. Le cœur, lui-même, bâtit ses fondements sur les cendres du doute. Il faut aimer sans raison et éradiquer les forces contraires.

 

Faut-il faire confiance aux apparences ? Mieux vaut être habité par l’invisible manteau de l’émotion-source où naît la rage et la révolte. Car douter, c’est créer. Car douter, c’est mourir quelque part et renaître plus loin. Vivre sans opinion, délester le courage du jugement, c’est, sans aucun doute, accepter de l’instinct et de l’intuition l’influence naturelle de nos imperfections. Et je préfère supposer que nos faiblesses soient nos trésors. La douleur nous impacte et la joie nous libère.

 

Mon désir est un geste d’adieu. Il souffre de ses carences, il soumet le réel aux trépidations de son voyage. Je meurs d’être dépossédé de toi à ce point. L’attirance m’emporte dans son exubérance, elle gifle mes incapacités et détrône un possible deuil avant même qu’il s’habille de noir. C’est pour cela que j’avance.

 

Il faut recommencer. Faire, dire, être, rire, dormir, jouir, vivre. Il faut ouvrir la page du monde, l’heure attendue, la porte encore fermée et l’histoire qui n’a pas encore exulté. 

 

Les cataractes du compromis s’étiolent avec l’artifice des vertus inconsidérées. Mon regard se pose sur le miel à butiner, mes lèvres gercent sur la peau gonflée des ulcères de la mauvaise heure. J’ai les mains posées sur l’orgie des vides où se brise le temps.

 

Une foule de résine mutilée se décalamine. La peur et l’ennui chassent l’eau de nos gorges à jamais désaltérées. Sans ton regard posé sur le mien, le monde des hommes ne peut connaître l’apaisement.

 

Nous sommes unis de nos faits, de nos exploits et de nos pâles démons. Nous ne sommes jamais vraiment seuls dans la chute. Nous brassons cette complicité humaine où en fermant les yeux, nous endurons l’outrage et la flétrissure de nos existences. Pauvres de toutes nos richesses, nous concédons à la servilité toute l’usure de la soumission. Chuter, c’est chavirer de ce tango aux pas étranges de l’abandon. Nous basculons, nous vacillons. Nos pieds et nos élans s’ajustent au rythme de l’unité. La marche devient contrainte, devient armistice, elle mue en une alliance sourde et bascule dans la capitulation. Ici, même l’illusion renonce à ses fourberies et le réel succombe. 

 

Tout se transforme en une pâte transparente. Inconscients, nous visitons ce que nous engendrons de nos fondements. La source est rugueuse, mais l’eau est têtue. Elle filtre nos terres et infiltre nos exigences.

 

- Bruno Odile - Tous droits réservés © 

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité