Aux creux de l’ombre muette.
Gouttes d’argiles sablonneuses et fragiles
Eaux résiduaires
S’écoulant dans la poche trouée du temps
Une vie aux sources du possible
Trace de lait volcanique sur des lèvres en feu de vérité
Perdantes et gagnantes
Sur la cible illusoire du petit matin
Le jour attendu et la nuit dissipée
Une marche solennelle sur l’empreinte foulée
Des siècles durant
Et, toujours ce doute imperturbable
Est-ce bien moi derrière le miroir ?
L’autre en moi-même
Affable buveur de brume
Griffe-moi, lèche-moi
De tes transes lumineuses
Laisse aux marées le soin de tourbillonner
De dissoudre et de recomposer
Je suis l’écume de tes eaux
Je suis le semis de tes déferlements
Ma vie est pleine, ma vie est vide
Minéral déposé aux parois
Force de vie éructant des ténèbres
Tétanisé devant la beauté du monde
En moi, un fantôme sauvage
Ricane et se moque
Des mots que j’utilise
Pour construire le hamac de mes rêves
Echafaudant des pays sans frontières
Des landes en dehors des bosquets
Des bouquets de violettes enserrés dans les bras de l’intuition
Impalpables tenues vibrant sur le haut des mats de bravoure
Souffle, puis s’essouffle le vent désemparé par des fêlures désertiques
Le mouvement rompt l’inertie tenace du fer dans sa rouille
Il embrouille les lignes d’horizon
Il fracture les alignements
Son élan jeune et frais ouvre à des voies remaniées
Des sentiers embourbés de lianes et d’herbes fugaces
Il n’est pas un moi qui tienne en équilibre
Pas un seul être debout sur le possible des jours
Courses rompues, intentions brisées
Je me suis refermé à l’abri de pierre
Dans mon manteau de jaspe
Le lent travail des eaux inachevées
Déblatère, liquide, des virées d’ivresses perdues
L’enfermement a le goût des limailles noires
Propagées dans un cosmos de brisures
Langue chaude à l’extrémité des trouées
Dans les salins d’une enfance pas encore rapatriée
Le point de rencontre est ailleurs
Evasif et séculaire
Le langage est en moi un ruisseau souterrain
Une alternative d’échanges mémoriels
Une source inasséchée toujours sur le qui-vive
La parole prunelle du monde humain
La parole déshabillée par l’éventail des regards
Toujours le mot écœuré par l’infini
L’expression brève, presque soutenue
Par une grammaire égarée
Entrouvrant l’invisible
Conscience de nos sens.
- Bruno Odile - Tous droits réservés ©