RésonNances (51)
Souverain, l’échange naît dans la déchirure de soi, là où dans un renfoncement de l’esprit, le neuf et l’ancien font orage.
Les phrases transportent des fagots aux allures martiales. Un escadron de mots traverse le brouillard des plaines matinales avant de glisser sur des plaies mal refermées. Je sens la matière proche et pénétrable.
Des centaines de serments demeurent attachés les uns aux autres dans l’attente d’une libération providentielle.
Il m’aura fallu sarcler, puis labourer encore et encore pour extraire de la pulpe sauvage toutes les graines nourrissantes de l’espoir qu’une sobre existence a pelé jusqu’à l’effroi.
Dans ce vagabondage de l’insaisissable, les pages se tournent et se retournent. Celles qui collent font ressac. Des gestes et des histoires brisées errent sur l’horizon inachevé et flottent au-dessus de l’absence où le vide s’accroit.
Le chagrin intolérable qui se manifeste encore au centre de mon corps est l’usurpateur de mes sens. Il est cet imposteur qui ne tolère pas le bonheur délivré gratuitement. Il est ce purulent labyrinthe exhortant d’avoir mal pour dire.
Je ne désespère pas de fuir du mal-être contenu, réprimé et cadenassé au fond de mes impasses négligées.
Au cœur de soi-même, poitrine contre poitrine, l’âme et le corps échappent à toutes les voies closes de l’abstinence. Elles désagrègent les carences dures de la rationalité.
Si tu le peux, écoute, toi aussi, gémir au fond de ton sang cette larme pénétrante, cet enfant affamé et qui ne sait le dire, ce vieillard usé qui a perdu la voix.
Aux fenêtres de l’existence et dans une présence subliminale subsistent encore l’aube fleurissante et l’été mourant d’une saison invraisemblable.
- Bruno Odile - Tous droits réservés ©